Nobuaki Tsuchiya Garage419
Nous avons découvert le travail de Nobuaki Tsuchiya lors d’un voyage dans les Alpes japonaises. Son travail nous a de suite interpellé par son caractère sculptural – mais fonctionnel – et la qualité de ses finitions. Présentant 3 de ses pièces au sein de notre sélection Objets Tactiles, nous échangeons avec lui sur sa vision de l’artisanat, l’influence de son territoire et sa relation à la sculpture.
Bonjour Nobuaki, pourriez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ?
Je m’appelle Nobuaki Tsuchiya. J’ai étudié le design à l’université puis j’ai commencé à travailler dans une boutique d’antiquités, un cabinet d’architecture et une menuiserie. Mon grand-père était menuisier, et depuis mon enfance j’aime fabriquer toutes sortes d’objets en bois. En 2022, j’ai naturellement installé mon atelier dans la région de Kiso dans la préfecture de Nagano, une région très montagneuse avec une abondance de bois. Je crée des meubles et des pièces utilitaires, notamment à partir de bois vert.
Vos sculptures sont très dessinées. Comment abordez-vous la sculpture sur bois ?
Je dessinais beaucoup à l’époque où j’étais étudiant, ce qui se reflète peut-être dans mes sculptures. Il existe de nombreux types de motifs mais je préfère les motifs abstraits, créés par une série de simples entailles par la lame. Dans l’architecture japonaise ancienne, on sculptait souvent des motifs sur les poutres avec une hachette pour les orner. Ces motifs sont nés d’une nécessité pratique mais ils dégagent une esthétique très graphique. Autrefois, il était difficile de scier de grandes pièces de bois courbé, on préférait donc utiliser les formes naturelles du bois et les orner de motifs fins à la lame. En créant mes sculptures, je m’efforce de respecter cette relation ancienne entre l’homme et le bois.
Le territoire semble très présent dans votre démarche. Comment influence-t-il votre travail ?
Kiso est une région très montagneuse, mais elle est historiquement importante car elle est traversée par l’ancienne route du Nakasendo (reliant Kyoto et Tokyo à l’ère Edo). Le cyprès de Kiso y est exploité depuis des siècles pour la construction. Cette région est marquée par la culture populaire témoignant de la vie des habitants : des objets anciens qui ont été transmis dans les familles, des maisons, des modes de vie, des métiers et des fêtes traditionnelles. Ce lieu, où la vie des gens est en harmonie avec la nature depuis toujours, m’inspire profondément dans mon travail.
Comment choisissez-vous le bois que vous sculptez ?
Les essences et tailles des arbres abattus localement sont variées. Je commence la production en découpant la bûche à la tronçonneuse, en pensant à l’usage que j’en ferai. J’utilise souvent du bois fissuré ou présentant des caractéristiques particulières, qui ne conviennent pas forcément pour des pièces utilitaires mais plutôt pour des sculptures.
Notre sélection d’automne, à laquelle vous participez, est un hommage à la sculpture sur bois. Pouvez-vous nous parler de votre relation avec cette technique ?
Outre la création de surfaces planes à l’aide de rabots ou d’outils similaires, il existe une technique consistant à faire de petites incisions répétées pour former des motifs variés. Je pense qu’une finition texturée permet d’imaginer le processus de travail, le temps passé, les sons produits, et même la sensation de l’écorce d’origine du bois.
Pouvez-vous nous présenter les trois pièces que vous avez réalisées ?
Ces trois présentoirs sont fabriquées en cerisier sauvage et châtaignier abattus localement. Le bois vert est découpé à la tronçonneuse, puis mis en forme au tour. Des lignes fines sont gravées sur toute la surface, chaque pièce étant gravée à la main avec une seule lame. Les pièces sont ensuite séchées, teintées avec des plantes naturelles, puis finies à l’huile et à la cire.
Les motifs sont inspirés des rizières et des herbes en pleine croissance, évoquant les parcelles de rizières à flanc de montagne et le riz ondulant au vent. Ici, la tradition de planter, cultiver et récolter le riz perdure. Mon travail d’incision répétée s’inspire de cette vie en symbiose avec la nature.
- Lieu : Kiso, Japon
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